Fiche juridique

Comment les collectivités locales peuvent agir contre le gaspillage alimentaire des produits locaux ?

Dispositifs juridiques

La politique de lutte contre le gaspillage alimentaire ne vise pas spécifiquement les produits alimentaires locaux et de qualité, mais la promotion de ces derniers va de paire avec la nécessité de promouvoir des modes de consommation, de production, de transformation et de distribution plus durables. Or, suivant l’Art. L. 541-1 c. env., la politique nationale de prévention et de gestion des déchets est un levier essentiel de la transition vers une économie circulaire et elle vise notamment à réduire le gaspillage alimentaire.

Un ensemble de dispositifs a justement été élaboré à cette fin particulière ; à défaut, les déchets alimentaires, comme les autres, relèvent des règles générales sur le traitement et la prévention des déchets. Ces règles générales seront très rapidement rappelées pour se concentrer sur la politique de lutte contre le gaspillage alimentaire.

Traitement et plans de prévention des déchets : règles générales

La loi dispose qu’il doit être permis aux ménages de trier à la source leurs déchets organiques afin qu’ils soient valorisés et non plus jeté dans les ordures ménagères résiduelles (collecte séparée).

À souligner : L’État et les CT ne sont pas les seuls à pouvoir agir . Les entreprises sont également sollicitées : « Tout établissement de vente au détail de plus de 400 mètres carrés proposant en libre-service des produits alimentaires et de grande consommation se dote, à la sortie des caisses, de bacs de tri sélectif pour récupérer les déchets d'emballages issus des produits achetés dans cet établissement » (L. 541-10-18 c. env.). Voir aussi l’Art. L. 541-10-1 c. env.).

La politique de prévention des déchets est déclinée par une série de trois documents stratégiques qui ressortent de la compétence de l’État, de la région et des communes :

  • Un plan national de prévention des déchets pour la période 2014-2020 a été élaboré par la ministre en charge de l’environnement avec la concertation des collectivités territoriales. Il fixe les objectifs de la politique de prévention et de gestion des déchets (L. 541-11 c. env.).
  • Sur cette base, chaque région élabore un plan régional de prévention des déchets (L. 541-13 c. env.).
    • Le projet de plan est élaboré à l'initiative et sous la responsabilité du président du conseil régional, en concertation avec des représentants des CT et de leurs groupements compétents en matière de collecte et de traitement de déchets (L. 541-14 c. env.).
  • Les communes (depuis le 1er janvier 1992) et les intercommunalités (depuis le 1er janvier 2017) doivent disposer de plans locaux de prévention des déchets (L. 541-15-1 c. env.).

Les communes et intercommunalités sont compétentes en matière de collecte et traitement des ordures ménagères (Art. L. 2224-13 CGCT). À ce titre, elles peuvent se doter d’outils pour agir en faveur du traitement des déchets organiques sur leur territoire. Cette compétence obligatoire peut faire l’objet d’un transfert de compétence au bénéfice des autres collectivités territoriales ou d’un syndicat mixte (Art. L. 541-15-1 c. env.).

Gaspillage alimentaire : dispositifs spécifiques

Dans la lignée de la politique de la politique de l’Union européenne (Plan d’action intégré en faveur de l’économie circulaire, déc. 2015), et en application de la directive cadre européenne 2008/98/CE, la France a d’abord développé sa politique de lutte contre le gaspillage à partir de documents d’orientation, tel le pacte national de lutte contre le gaspillage alimentaire (actuellement pacte 2017-2020). Depuis la loi n° 2016-138 du 11 février 2016 relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire (dite loi « Garot »), le gaspillage alimentaire a fait l’objet de dispositions législatives particulières. La loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (EGALIM) et l’Ordonnance n° 2019-1069 du 21 octobre 2019 relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire, ainsi que la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire et l’Ordonnance n°2020-1142 du 16 septembre 2020 relative à la prévention et à la gestion des déchets, sont venues parfaire le dispositif.

Cette politique spécifique de lutte contre les déchets alimentaires s’articule avec la politique nationale de l’alimentation qui fait de la lutte contre le gaspillage alimentaire l’une des priorités du PNA (Art. L. 1 c. rur.).

La politique de lutte contre le gaspillage alimentaire vise à combattre les pratiques qui aboutissent à perdre, jeter ou dégrader, à une étape de la chaîne alimentaire, de la nourriture destinée à la consommation humaine (définition : Art. L. 541-15-4 c. env.). L’objectif de cette politique de lutte contre le gaspillage alimentaire est de « Réduire le gaspillage alimentaire, d'ici 2025, de 50 % par rapport à son niveau de 2015 dans les domaines de la distribution alimentaire et de la restauration collective et, d'ici 2030, de 50 % par rapport à son niveau de 2015 dans les domaines de la consommation, de la production, de la transformation et de la restauration commerciale » (Art. L. 541-1 c. env. issu de la loi 2020-105).

Dans cette optique, l’État a institué « un label national 'anti-gaspillage alimentaire' pouvant être accordé à toute personne morale contribuant aux objectifs nationaux de réduction du gaspillage alimentaire » (Art. L. 541-15-6-1-1 c. env. issu de la loi n°2020-105 ; D. n° 2020-1651, 22 déc. 2020 codifié aux Art. D. 541-95 et suivants c. env.).

  • Les CT peuvent bénéficier de ce label pendant trois ans dès lors qu’elles contribuent aux objectifs nationaux de réduction du gaspillage alimentaire et respectent les exigences d'un référentiel approuvé par arrêté (pas publié à ce jour).

Les CT peuvent aussi agir directement contre le gaspillage alimentaire dans leur champ de compétence.

  • Ainsi, dans les établissements de restauration collective dont elles ont la charge (que les opérateurs soient publics ou privés), doit être mis en œuvre une stratégie de lutte contre le gaspillage alimentaire sur la base d’un diagnostic préalable interne du gaspillage alimentaire (quantité, coût, estimation des produits dits de « qualité Egalim » que les économies liées à la lutte contre le gaspillage leur auraient permis de réaliser) ( L. 541-15-3 c. env.).
  • Cette obligation pèse aussi sur les opérateurs privés des établissements de restauration collective et sur les opérateurs agroalimentaires (L. 541-15-3 c. env.).
  • Cette stratégie doit respecter la hiérarchie posée à l’Art. L. 541-15-4 c. env. selon lequel « Les actions de lutte contre le gaspillage alimentaire sont mises en œuvre dans l'ordre de priorité suivant : 1° La prévention du gaspillage alimentaire ; 2° L'utilisation des invendus propres à la consommation humaine, par le don ou la transformation ; 3° La valorisation destinée à l'alimentation animale ; 4° L'utilisation à des fins de compost pour l'agriculture ou la valorisation énergétique, notamment par méthanisation ».
  • Cette hiérarchie s’impose aussi aux distributeurs du secteur alimentaire, aux opérateurs de commerce de gros, aux opérateurs de l'industrie agroalimentaire produisant des denrées alimentaires pouvant être livrées en l'état à un commerce de détail alimentaire (L. 541-15-5 c. env.).
  • En application de cette hiérarchie, est organisé le don de denrées alimentaires (L. 541-15-6 c. env.).

À souligner : Les entreprises sont de plus en plus sollicitées. Ainsi, certaines entreprises doivent rendre publics chaque année, par tout moyen de communication, leurs engagements en faveur de la lutte contre le gaspillage alimentaire, (L. 541-15-6-1 c. env.). Des accords collectifs interprofessionnels agricoles portant sur « la réduction du gaspillage alimentaire à tous les stades de la chaîne alimentaire » peuvent  également voir le jour et être homologués par l’État (Art. L. 230-4, R. 230-36-2 c. rur.). En outre, les entreprises doivent respecter le droit de la consommation qui prévoit notamment que, « Lorsqu’un produit alimentaire comporte une date de durabilité minimale, celle-ci peut être accompagnée d’une mention, précisée par décret, informant les consommateurs que le produit reste consommable après cette date » (Art. L. 412-7 c. consom.).

Sur la base du pacte national de lutte contre le gaspillage alimentaire, les CT peuvent également développer des opérations locales de sensibilisation ou mettre en place des actions de prévention dans la restauration scolaire dans les établissements à leur charge.

Ecosystème graphique

Codes concernés

Code de la consommation

Code de l’environnement

Code général des collectivités territoriales

Code rural

Collectivités compétentes

Communes

Départements

EPCI

Région

Pour aller plus loin

Le label national "anti-gaspillage alimentaire"

Ce label peut aussi profiter aux acteurs de l’agro-alimentaire, de la distribution et de la restauration collective et aux associations.