Dispositifs juridiques
Les collectivités territoriales (CT) sont au premier rang pour promouvoir les produits locaux dans les restaurants collectifs dont elles ont la charge.
À cette fin, elles vont généralement devoir passer par les règles de la commande publique.
Elles doivent donc en respecter les règles et principes, notamment l’égal accès à la commande publique et la non-discrimination, ce qui interdit de choisir un produit ou un service en raison de sa seule origine géographique. Par conséquent, un marché public fondé uniquement sur le caractère local d’un produit, sans justification particulière, risque fort d’être remis en cause.
➔ À souligner : c’est sans doute ce qui explique la formulation « ambiguë » retenue par le législateur à l’occasion de l’adoption de la loi n°2018-938 du 30 octobre 2018, dite loi « EGALIM » et codifiée à l’article L. 230-5-II c. rur., selon laquelle les CT en charge de la restauration collective publique « développent […] l’acquisition de produits dans le cadre de projets alimentaires territoriaux » (et non pas « développent l’acquisition de produits locaux »).
Les CT peuvent constituer des groupements de commandes (Art. L. 2113-6 et suivants du CMP), ce qui permet par exemple à deux ou plusieurs acheteurs publics et privés (dans certains cas) de mener un projet commun ; d’autre part, la commande publique de produits locaux passe normalement par un marché de fournitures mais certaines CT tentent aujourd’hui de passer par des marchés de prestation environnementale (par ex., la Collectivité « Eau du bassin rennais »).
Lors de l’élaboration du cahier des charges de l’appel d’offre, la CT va pouvoir orienter sa commande de manière à favoriser les « produits locaux ». Nous présentons ci-après les points clefs sur lesquels il faut être vigilant :
- Définition préalable des besoins
- Allotissement
- Critères d’attribution du marché
Définition préalable des besoins
La définition préalable des besoins est une étape essentielle dans l’élaboration d’un marché. Lors de la définition des besoins, l’acheteur prend en compte les objectifs de développement durable (Art. L. 2111-1 du Code des marchés publics - CMP - institué par l’Ordonnance n°2018-1074 du 26 novembre 2018 portant partie législative du Code des marchés publics). Cela permet d’intégrer des critères environnementaux liés à la saisonnalité, à la qualité organoleptique et nutritive des denrées, à des délais rapides de livraison.
Ce travail de définition des besoins comprend également l’exécution du marché pour laquelle la CT peut prévoir des clauses permettant de prendre en compte des considérations sociétales et environnementales (Art. L. 2112-2 du Code des marchés publics) :
- Ces conditions d’exécution peuvent se « rapporter à un processus spécifique de production, de fourniture ou de commercialisation » (L. 2113-3-1 du Code des marchés publics).
- Les collectivités peuvent ainsi insérer des clauses liées à l’empreinte carbone de l’approvisionnement dont le corollaire serait, sous certaines conditions d’optimisation logistique, la réduction des déplacements des véhicules de livraison pour réduire les émissions de gaz à effets de serre.
- D’autres conditions pourraient également utilement être mentionnées comme la possibilité pour les fournisseurs de réaliser des animations dans les restaurants ou à l’inverse pour les convives des restaurants de venir visiter les lieux de productions, d’utiliser certains types d’emballage (par ex., les cagettes sont plutôt privilégiées en circuits courts), etc. Toutes ces conditions sont à manier avec précaution car elles doivent être justifiées vis-à-vis de l’objet du marché.
L’approvisionnement local prend encore plus de sens s’il contribue à promouvoir une alimentation garantissant une meilleure qualité des produits que celle résultant du marché global. La loi du 30 octobre 2018 (loi EGALIM) va clairement en ce sens (Art. L. 1 c. rur.). Le Gouvernement doit d’ailleurs présenter aux acteurs publics en charge de la restauration collective des outils d’aide pour atteindre les objectifs fixés par la loi EGALIM et pour formuler les marchés publics et une formation des personnels concernés (Art. L. 230-5-7 c. rur.).
Allotissement
Une fois les besoins définis, les CT doivent allotir (Art. L. 2113-10 et -11 du CMP) finement leur marché afin d’augmenter la possibilité pour les petits exploitants agricoles de répondre aux appels d’offre.
Cette stratégie d’allotissement « fin » des marchés peut être conjuguée avec un travail d’identification des producteurs-fournisseurs locaux. Dans le cadre de leur obligation réglementaire de diffusion de l’information via les canaux officiels (R. 2131-1 du CMP), les CT peuvent notamment s’assurer de la bonne diffusion des appels d’offre auprès des exploitants et aller également à leur rencontre pour mieux évaluer les capacités locales d’approvisionnement.
Critères d’attribution du marché
L’acteur public définit également les critères d’attribution du marché qui doivent être « objectifs, précis et liés à l’objet du marché public ou à ses conditions d’exécution » (Art. 2152-7 du CMP).
Les performances en matière de protection de l’environnement et de développement de l’approvisionnement direct des produits de l’agriculture en font partie (R. 2152-7 2° - a) du CMP).
Dans la décision d’attribution du marché ces critères peuvent être pondérés pour favoriser l’approvisionnement en produits locaux en raison de leur pertinence environnementale.